Association d'Assistants Familiaux Lorrains

Bientôt un numéro d'appel pour les auteurs de violences faites aux enfants ?

14-11-2019

Neuf mois après sa nomination, le secrétaire d'État Adrien Taquet est revenu ce mercredi 6 novembre sur les trois « piliers » de la stratégie nationale de prévention et de protection de l’enfance 2020-2022 : la lutte contre les violences faites aux enfants, la prévention et la réforme de l'Aide sociale à l'enfance (ASE). Il s'exprimait lors d'un rendez-vous organisé par l'Association des journalistes de l'information sociale. Il y a évoqué la possible création d'un numéro d'appel destiné aux auteurs de violences faites aux enfants.

Mieux accompagner les médecins généralistes

« Un enfant meurt tous les 5 jours sous les coups de ses parents, rappelle Adrien Taquet. La protection de l'enfance devrait être à la une des agendas politiques et médiatiques chaque jour qui passe. » Le plan dévoilé prochainement a vocation à « garantir la sécurité des enfants, en tout lieu, à tout moment ». Le plan 2017-2019 de lutte contre les violences faites aux enfants était surtout axé sur les violences intrafamiliales. « Nous voulons élargir ses mesures, tout en renforçant les dispositifs existants, comme le fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles et violentes », avance-t-il. Les unités d'accueil médicojudiciaires pédiatriques, qui offrent aux enfants victimes de violences sexuelles un lieu d'accueil sécurisant, devraient également être généralisées à travers la France.

Les violences faites aux enfants sont par ailleurs à articuler avec les violences conjugales, dont un Grenelle dédié a été lancé en septembre. « On considère enfin les enfants comme des victimes de ces violences », souligne le secrétaire d'État.

Comme pour le repérage des violences conjugales, les médecins généralistes ont un rôle à jouer pour détecter les violences faites aux enfants. Toutefois, le secrétaire d'État reconnaît un sentiment d'isolement de la part des médecins face à ces situations : « dans chaque communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS), il faudrait un service pédiatrique référent avec qui le médecin généraliste pourrait échanger sur une situation précise ».

Un numéro pour les auteurs potentiels ?

« Nous partons généralement des besoins de l'enfant, mais nous souhaitons aussi nous intéresser aux auteurs des violences. Qu'est-ce qui déclenche cette violence ? Pourquoi récidivent-ils ? Il y a peu de recherches sur ces aspects », relève Adrien Taquet. Une réflexion est en cours sur la mise en place éventuelle d'un dispositif, déjà utilisé en Allemagne depuis 2005 : un numéro de téléphone (différent du 119, numéro d'urgence pour l'enfance en danger) destiné à des auteurs potentiels, avant un passage à l'acte. « Ce numéro s'adresserait à des personnes qui ont le sentiment que leur rapport aux enfants est problématique », explique Adrien Taquet.

Concernant le pilier prévention, qui porte sur l'accompagnement à la parentalité, une commission pilotée par Boris Cyrulnik, lancée en septembre, travaille sur la période des 1 000 premiers jours de l'enfant (du 4e mois de grossesse à ses 2 ans). « C'est la première fois en France que l'on réfléchit véritablement à une politique publique sur cette période de la vie, note Adrien Taquet. Nous sommes convaincus que c'est un moment où l'on doit investir fortement car c'est là que se jouent beaucoup de choses pour la santé future de l'enfant et que se creusent les inégalités sociales ».

Cette commission d'experts doit rendre un rapport début 2020, avec des mesures concrètes, notamment sur les congés parentaux et les modes d'accueil des enfants. En parallèle, le secrétaire d'État va chaque semaine à la rencontre de parents à travers la France, dans le cadre d'une démarche intitulée « 1 000 parents pour penser les 1 000 jours ». Avant l'été prochain, des mesures concrètes devront être présentées à la lumière de ces deux dispositifs.

Une stratégie opérationnelle et concrète

Quant à la réforme de l'ASE, détaillée dans la stratégie nationale 2020-2022, Adrien Taquet l'affirme : « aujourd'hui, nous sommes dans une phase d'exécution. Le plan d'action présenté dans la stratégie est opérationnel, concret ». Après la loi de Laurence Rossignol de 2016 relative à la protection de l'enfant, il n'y aura pas de « loi Adrien Taquet » : « nous souhaitons assurer l'application et la mise en œuvre de cette loi, tout en la modernisant », assure-t-il. La question de la gouvernance est notamment au cœur des préoccupations. Pour Adrien Taquet, « il est essentiel de se doter d'un nouvel organe fort pour piloter cette politique de protection de l'enfance ». Une mission d'expertise par l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) est en cours pour répondre à ce besoin.

Dans le cadre de cette stratégie nationale, 80 millions d'euros supplémentaires seront alloués à 30 départements pour la protection de l'enfance dès 2020.