Les hospitalisations de jeunes femmes pour automutilations en forte hausse
22-09-2025
Quentin Haroche | 19 Juin 20250
Confirmant la dégradation de la santé mentale des jeunes, les derniers chiffres de la Drees mettent en lumière la hausse des gestes auto-infligés dans la population, notamment chez les femmes.
L’actualité autour de la santé mentale est tristement répétitive. Il semble en effet qu’il ne s’écoule pas une semaine sans qu’une nouvelle étude vienne confirmer une réalité désormais bien connue, à savoir que les adolescents et les jeunes adultes, et en particulier les femmes, sont touchés, depuis plusieurs années, par une crise de la santé mentale. Deux semaines après avoir publié une étude mettant en lumière la hausse des troubles anxieux et dépressifs chez les jeunes depuis le déclenchement de la pandémie de Covid en 2020, la Drees (le service des statistiques du ministère de la Santé) publie de nouveaux chiffres sur les hospitalisations pour tentatives de suicide et gestes auto-infligés.
Selon ces données, ce sont 82 000 personnes qui ont été hospitalisées (hors service de psychiatrie) au moins une fois en 2024 pour tentative de suicide ou geste auto-infligé, dont 64 % de femmes. La Drees note une augmentation constante depuis 2020 et le début de l'épidémie de Covid, avec une hausse de 6 % entre 2023 et 2024, plus marquée chez les femmes.
Les hospitalisations de filles de 10-14 ans en hausse de 126 % depuis 2020
« Cette évolution globale masque des évolutions différentes selon les âges et les sexes, l’augmentation du total étant principalement attribuable à de persistantes hausses des hospitalisations d’adolescentes et de femmes jeunes » commente la Drees. Ainsi, chez les filles âgées de 10 à 14 ans, les hospitalisations ont progressé de 22 % entre 2023 et 2024 et de 126 % depuis 2020 ; chez les 15-19 ans, elles ont augmenté de 14 % entre 2023 et 2024 et de 86 % depuis 2020. La hausse est moins impressionnante chez les femmes plus âgées (+ 4 % en 2024 chez les 20-24 ans, + 9 % chez les 25-29 ans), tandis que les hospitalisations sont en baisse chez les femmes de plus de 30 ans, et ce depuis plus d’une décennie.
On observe également une progression des hospitalisations pour tentative de suicide ou geste auto-infligé chez les jeunes hommes : + 17 % chez les 15-19 ans en 2024, + 8 % chez les 20-24 ans, + 7 % chez les 25-29 ans. Les garçons restent tout de même bien moins touchés par ce phénomène que les filles : plus de 80 % des personnes de 15-19 ans hospitalisées sont des filles. Rappelons cependant que les hommes meurent deux fois plus par suicide que les femmes, en raison de l’utilisation de méthodes plus violentes (arme à feu, pendaison…).
Les réseaux sociaux et les discriminations de genre sur le banc des accusés
« Les données d’hospitalisations en psychiatrie sont moins fiables et subissent d’importantes évolutions » note la Drees, mais dessinent le même tableau, à savoir une hausse des tentatives de suicide et des gestes auto-infligés chez les jeunes, notamment chez les femmes. Ainsi, on compte en 2024 deux fois plus de femmes hospitalisées en psychiatrie pour ce diagnostic que d’hommes et la moitié d’entre elles ont moins de 30 ans. « Parmi ces dernières, les hausses d’hospitalisations sont constantes depuis les années 2015-2017 et massives chez les moins de 25 ans » analyse la Drees.
Ces nouvelles données et les nombreuses autres études publiées ces derniers mois sur le sujet confirment « la brutale dégradation de la santé mentale d’une importante minorité d’adolescentes et de femmes de moins de 30 ans », « un phénomène international apparu dans les années 2010, que la crise sanitaire de 2020 parait avoir accentué » rappelle la Drees. Reste à en trouver les causes : sans trancher définitivement, la Drees pointe du doigt les suspects habituels, à savoir « le mésusage des réseaux sociaux et les agressions spécifiques à cette population qui peuvent y avoir lieu ».
C’est dans ce contexte que s’inscrit le plan en faveur de la santé mentale dévoilé par le gouvernement la semaine dernière et qui met l’accent sur le repérage des troubles psychiatriques en milieu scolaire. Un plan que la quasi-totalité des syndicats de psychiatres a jugé insuffisant pour répondre à la crise de la santé mentale que traverse la jeunesse française.