Des milliers d’enfants handicapés privés de rentrée scolaire
22-09-2025
Quentin Haroche | 25 Août 20250
Des milliers d’enfants handicapés privés de rentrée scolaire
Comme chaque année, l’UNAPEI alerte sur les lacunes de l’école inclusive, qui prive de scolarité des milliers d’enfants handicapés en France.
C’était il y a un an presque jour pour jour. Le 28 août 2024, Paris fêtait en grande pompe l’ouverture des Jeux Paralympiques, deux semaines de fête au cours desquelles la capitale et la France allaient célébrer l’inclusion et l’abnégation des personnes handicapées. Un an après les feux d’artifice et les effusions de joie, difficile de nier que l’idée d’une France totalement inclusive reste partiellement une chimère. C’est le cas dans le sport, dans le monde du travail, en termes d’accessibilité et bien sur dans le milieu scolaire.
A une semaine de la rentrée des classes, l’Unapei (Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis) lance ainsi la 7ème édition de son mouvement « J’aiPasEcole », visant à mettre en lumière les très nombreux cas de déscolarisation d’enfants handicapés mentaux ou atteints de troubles autistiques.
Outre la publication de témoignages de parents ne parvenant pas à trouver de solutions de scolarisation pérennes pour leurs enfants, l’Unapei relaye des chiffres particulièrement marquants. Ainsi, sur les 3 600 enfants handicapés pris en charge par des associations membres de l’Unapei, 51 % d’entre eux sont scolarisés moins de 6 heures par semaine (dont 13 % ne sont absolument pas scolarisés) et seulement 19 % ont classe plus de 12 heures par semaine. L’Unapei indique également que sur 1 460 enfants accompagnés par leurs associations membres et scolarisés en milieu ordinaire, seulement 38 % bénéficient d’une accompagnante d’élève en situation de handicap (AESH).
Des progrès encore insuffisants selon l’Unapei
« Malgré les promesses et ambitions du gouvernement, ces chiffres révèlent les limites d’un système en tension, où les suppressions de postes spécialisés, les difficultés de recrutement, la formation insuffisante des enseignants et des AESH, viennent contrer les objectifs affichés » constate Luc Gateau, président de l’Unapei, qui demande aux pouvoirs publics de « garantir une solution adaptée pour chaque enfant, pas une réponse par défaut ».
L’Unapei ne nie pas que des progrès ont été faits sur le terrain de l’école inclusive ces dernières années. Le nombre d’enfants handicapés scolarisés a ainsi augmenté de plus de 30 % depuis 2017 et dépasse désormais les 500 000. Les différentes solutions pour permettre une scolarisation adaptée à la lourdeur du handicap de l’enfant (IME ou ULIS notamment) se sont également multipliées ces dernières années.
Mais c’est surtout le manque de personnel et de formation qui empêche l’école de devenir véritablement inclusive. Les AESH, chargés d’accompagner ces enfants handicapés, ont certes vu leur nombre augmenter ces dernières années (+35 % depuis 2017, ils sont désormais 125 000 au total) mais restent en nombre insuffisant. Les promesses d’Emmanuel Macron, qui avait annoncé vouloir assurer des contrats de 35 heures aux AESH et une hausse de leur rémunération, n'ont pas été tenues.
Faut-il remettre en cause l’école inclusive ?
La situation budgétaire difficile du pays n’incite d’ailleurs pas à l’optimisme sur ce point. En quête désespérée d’économies, le gouvernement pourrait ainsi décider de rogner sur différentes aides aux personnes handicapées, dont l’allocation adulte handicapé (AAH) et l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH). L’idée figure en tout cas dans un rapport conjoint de l’Inspection générale des finances (IGF) et de l’Inspection des affaires sociales (IGAS) remis dernièrement au gouvernement.
Autre sujet d’inquiétude pour les familles d’enfants handicapés : la généralisation des pôles d’appuis à la scolarité (PAS), dispositifs chargés de trouver les solutions de scolarisation adaptée à chaque enfant, prévue pour 2027, a du plomb dans l’aile. La proposition de loi portant ce projet est actuellement au point mort au Parlement, en raison de débats techniques sur l’attribution des rôles entre l’Education Nationale et les départements.
Face à ces difficultés persistantes, l’Unapei commence peu à peu à briser un tabou : celui de la remise en cause de l’école inclusive et de l’idée que les enfants handicapés devraient à tout prix être scolarisés avec les autres enfants. « L’école inclusive ne doit pas devenir un dogme. Ce qui compte, c’est que chaque enfant ait le mode de scolarisation adapté à ses besoins réels, qu’elle soit en école ordinaire ou en établissement spécialisé » plaide ainsi Luc Gateau.